Voilà déjà plus d’un an que je parcours les routes d’Asie…
Si je suis partie, c’est bien sure pour réaliser mon projet de film et pour me réaliser en quelques sortes, moi aussi, à travers toutes les rencontres que j’ai pu faire ; mais c’est aussi pour retrouver un peu de cette liberté à laquelle j’ai gouté pour la première fois voilà près de 10 ans, lors de mon premier voyage en solo.
Ce premier voyage, vous l’aurez deviné, je l’avais fait en Inde ; et je garde depuis, une affection particulière pour ce pays…
Terre de contrastes et de paradoxes où rien ne semble avoir de sens, l’inde déconcerte le voyageur en permanence. On l’aime ou on la déteste, mais il paraît que jamais on y reste indifférent.
Inde du nord : je t’aime, moi non plus…
En voyage, comme dans une relation amoureuse, il y a des hauts, des bas… Un séjour en Inde, même quand on a l’habitude, n’est pas de tout repos, et vous allez, chers lecteurs, bientôt savoir pourquoi !!
Je suis arrivée à New Delhi, la capitale de l’Inde, le 3 décembre au matin, avec 46 heures de bus dans les pattes et une sérieuse envie de dormir !!!
J’avais rendez-vous dans un hôtel de Pahar Ganj, le quartier des bagpackers, avec mon ami Denis, sensé être arrivé la veille de Paris.
Première déception, arrivée au lieu du rendez-vous, pas de Denis !! Ni dans l’hôtel dont il m’avait envoyé l’adresse avant son départ, ni dans les hôtels d’à coté…
Je sais qu’en Inde rien n’est jamais simple et qu’un rendez vous manqué est chose courante ; du coup, n’arrivant pas à le joindre au téléphone, je lui laisse un email et je prends une chambre dans l’hôtel prévu.
En milieu d’après-midi, voilà Denis qui se pointe, tout dégouté de s’être fait arnaquer en sortant de l’aéroport par un taxi affabulateur qui l’aura tourné en bourrique avant de le lâcher, en pleine nuit, dans un hôtel hors de prix (prix sur lequel le chauffeur aura bien sure touché une grosse commission !).
Bon… à Delhi l’arnaque est connue mais quand on vient pour la première fois, forcement on ne s’y attend pas.
Quoiqu’il en soit 2 jours plus tard, on a été rejoint par notre pote Romain, tout juste débarqué d’Iran. Après une courte visite de la capitale, nous avons décidé de partir pour Varanasi, la ville sainte (que partout ailleurs on continue d’appeler Bénares) où il est bon de finir sa vie lorsque l’on est hindou.
Ensuite, alors que l’on voulait rejoindre Agra pour se faire une idée du célèbre Taj Mahal, on a été détourné (vous comprendrez pourquoi dans la section des coups durs..) de notre route pour au final échouer à Jaipur, dans le Rajasthan.
De là, j’ai abandonné mes potes pour rentrer à Delhi accueillir mon amoureux à sa sortie de l’aéroport. Romain à fait de même avec sa chérie quelques jours plus tard, et nous nous sommes tous retrouvé (avec quelques jours de retard et de nombreuses péripéties à raconter en ce qui nous concernait, Ricardo et moi) à Jaisalmer, aux portes du désert du Thar.
Bénarès, ou comment apprendre à déjouer les tours des petits mendiants des bords du Gange…
Lorsque l’on se promène le long des ghâts de Varanasi, on est sans cesse abordé par des gamins qui font les rabatteurs pour les pêcheurs désireux d’emmener les touristes faire un tour sur le Gange. Entre ceux qui vendent des bougies et des fleurs à offrir aux déités des temples et ceux qui posent pour des photos à 5 roupies, il est quasi impossible de marcher tranquillement. Alors pour l’ambiance chargée de spiritualité et de mystère sur les bords du fleuve sacré, il faudra repasser…
Cependant, une fois acceptée l’idée que les ghâts ne sont pas le meilleur endroit pour méditer, on se rend compte que c’est le poste d’observation parfait pour se faire une idée des activités variées des habitants de Bénarès.
Entre les gamins qui tirent des cerfs-volants et jouent aux billes dans le sable, les vieux qui passent le temps en buvant du thé, les croyants qui font leurs ablutions seuls ou en groupe et les vendeurs ambulants, une journée ne suffit pas pour tout observer.
Cela dit, en dehors de ses ghâts, Bénarès vaut vraiment le détour… La vieille ville est faite de ruelles étroites et grouillantes de vie ; et ici, encore plus qu’ailleurs, les vaches règnent sur la ville, à tel point que nul n’ose les déranger…
Mes rencontres
Alors que Romain voyage depuis déjà quelques semaines au moyen-orient et que nous avions prévu de nous retrouver en Inde, Denis s’est décidé au tout dernier moment à prendre quelques semaines de vacances avant de commencer un nouveau boulot d’infirmier urgentiste dans un hôpital de Versailles.
Pradhip et Anoop m’ont été présenté par Denis et Romain. Ils se sont rencontré dans le train et ont absolument tenu à nous présenter leurs familles respectives, une fois arrivés à Varanasi. Petite plongée dans la famille traditionnelle indienne… Plutôt sympathique !!!
Jusque là, tout va bien…
Allahabad, citée maudite
Je ne sais pas quelles erreurs nous avons commis pendant notre séjour dans la ville sainte, mais apparemment nous méritions d’être punis… Je vais tout vous raconter mais pour faire simple, je vais directement placer l’exposé des faits durant les jours qui ont suivi notre départ de Bénarès dans la section « coups durs ».
Mes rencontres
Aucune qui vaille la peine d’être rapportée ici…
Mes coups durs
Comme j’ai commencé à vous l’expliquer un peu plus haut, Denis, Romain et moi avons quitté Varanasi avec l’intention de prendre un train pour Agra. Seulement lorsque nous sommes arrivés à la gare, il n’y avait plus de place en seconde classe et nous avons du embarqué dans le train en « general class », la moins chère, on a vite compris pourquoi…
Les tickets étant, pour cette classe, en vente illimitée, on s’est retrouvé dès la départ dans un wagon surpeuplé, et pas un cm2 de libre ou poser ses fesses. Au fur et à mesure des kilomètres, chacun a finalement trouvé une position à peu près supportable, jusqu’à ce que l’on s’arrête dans une grande gare où des centaines de passagers ont tenté de rentrer dans le wagon déjà bondé. Panique à bord !! Les plus petits et les plus faible luttaient pour leur survie, tentant de ne pas se faire écraser par la mase humaine qui forçait l’entrée du wagon tandis qu`à l’intérieur on faisait barrage pour essayer de préserver des conditions de voyage déjà à peine acceptables.
Alors que Denis, qui était à côté de moi, faisait barrage pour qu’on ne soit pas écrasé, et me moi je m’appuyais de mon bras gauche contre la paroi pour ne pas tomber sur les deux types recroquevillés à mes pieds, un jeune imbécile s’amusait, de l’extérieur, à passer le bras par la fenêtre du train pour me peloter les seins. Une fois… puis une seconde… J’ai pété les plombs !!! Quelle horrible sensation que de se faire tripoter sans pouvoir bouger d’un pouce, ni pour réprimander l’agresseur, ni même pour éviter ses attaques…
Pour nous, c’en était trop. J’ai commencé à pleurer et à la station suivante, on s’est frayé un chemin parmi les corps compressés et on est descendu du train.
On s’est retrouvé au milieu de nulle part et, le train suivant pour Agra ayant été annulé, nous avons fini (après de longues heures d’attente au bord de la route à regarder passer des bus tellement bondé qu’ils ne prenaient même pas la peine de s’arrêter) par embarquer dans un bus pour la ville la plus proche : Allahabad.
Comme une mauvaise nouvelle n’arrive jamais seule. Lorsque nous sommes arrivés à Allahabad, nous avons passé des heures à chercher une chambre d’hôtel, poursuivis par des rickshaw-wallahs bien décidés à toucher une commission sur le prix de notre chambre. Rien à faire, tout était complet, et nous avons du nous rabattre sur la seule chambre de libre de toute la ville, pas terrible et vraiment hors de prix.
Je me souviens d’ailleurs que nous étions tellement fatigués et dégoutés des péripéties de la journée que nous avons diné ce soir là dans une gargote en face de l’hôtel, probablement la plus sale que j’ai jamais vu au cours de mon voyage : une forte odeur de moisie se dégageait des murs tandis que rats et cafards s’en donnaient à cœur joie sous notre table et tout autour de nous. Un vrai cauchemar !!!
Le soir même nous avons décidé de quitter Allahabad le lendemain à la première heure.
Chose dite, chose faite : à peine réveillés on a quitté notre hôtel pourri pour la gare. Une fois de plus, pas de places en seconde classe dans le train pour Agra…
Pour conjurer le sort, on a donc décidé de se rendre à Jaipur, dans le Rajasthan.
Là encore, pas de ticket disponible en seconde, ni en première classe, mais cette fois, le contrôleur nous assure qu’en achetant des tickets de 3eme classe (la fameuse « General class »), on pourrait, à l’arrivé du train, payer un supplément et se faire surclasser en 2nde classe. On achète donc les billets, on attend le train qui finit par arriver avec 4 heures de retard, et là, surprise : le même contrôleur nous dit qu’il y a une liste d’attente, que nous ne sommes pas dessus, et que nous ferions mieux de revenir le lendemain !!!
Enragés, et presque désespérés, on est quand même monté dans le train en 2nde classe, et on a passé les 16 heures du trajet avec nos sacs, entre la porte et les toilettes. Probablement le pire trajet de ma vie (après celui de la veille, bien sure !!).
Jaipur, notre havre de paix
Je dois dire qu’une fois arrivés à Jaipur, les rabatteurs infatigables ne nous ennuyaient plus, et la chambre d’hôtel simple mais propre, nous a paru le paradis…
J’ai donc passé 3 jours agréables dans la ville rose avec mes potes, à peine le temps de décompresser, avant de repartir seule à Delhi pour récupérer mon chéri qui arrivait de Paris.
Delhi, la ville de tous les délits
Retour a Delhi donc… Ricardo et moi avons pris une chambre dans un hôtel de Karol Bahg, un quartier commerçant, pour éviter l’horrible ghetto de Pahar Ganj, où les bagpackers du monde entier se retrouvent dans des hôtel mal famés, entourés de boutiques qui emploient plus de rabatteurs que de vendeurs..
Malheureusement, très rapidement les chosent ont mal tournées.
Mes coups durs
Tout d’abord, alors que notre programme était de passer les fêtes de fin d’année avec Denis, Romain et Marie, mes potes de Paris, dans le Rajasthan, avant de filer vers le Pakistan où je comptait tourner mes portraits de femmes avant de revenir en Inde pour quelques mois, on s’est retrouvé dans l’impossibilité d’obtenir des visas.
Le problème ne venant pas de l’ambassade du Pakistan, mais de l’ambassade de France, qui refusât catégoriquement de nous délivrer les autorisations nécessaires…
Le comble, puisque depuis la France, un visa touristique pour le Pakistan s’obtient sans aucun problème !!
A peine remis de cette déception, nous avons décidé de prendre le train pour rejoindre les autres à Jodhpur. Seulement, alors que nous venions d’embarquer dans le wagon et que l’on s’affairait à cadenasser nos bagages, Ricardo s’est fait volé le sac contenant tous ses papiers (passeport, visa et carte de séjour) et tous ses sous (CB et 500 euros en cash)…
Je ne vais pas m’étendre sur la soirée qui a suivi, passée au poste de police de la gare d’Old Delhi, à tenter de convaincre les flics d’accepter que l’on reporte un vol et non une perte de bagage (très mauvais pour leurs statistiques !!).
La suite est encore pire : il nous aura fallu un mois et 270 euros pour faire renouveler son passeport (l’ambassade de Cuba en Inde n’ayant aucun pouvoir administratif, il aura fallu tout faire passer par l’ambassade de Cuba à Paris) ; une semaine de plus pour le visa indien et pour finir en beauté : une 10aine de jours pour que Ricardo obtienne le droit de rentrer en France avec (quelle ironie…) un visa de touriste valable 30 jours et qui nous aura couté 60 euros!!!
Bref, les vacances dont on rêvait tous les deux ne se sont pas vraiment passées comme prévues… On est resté bloqué à Delhi pendant près d’un mois, sans pour autant profiter de la ville puisqu’il nous fallait régler ces histoires de papiers.
Retour dans le Rajasthan
Une fois enregistrée la demande de renouvellement de passeport de Ricardo, sachant que l’on aurait à patienter plusieurs semaines, on est tout de même parti dans le Rajasthan, rejoindre Marie, Romain et Denis : une petite semaine à Jaisalmer, dont 3 jours de safari à dos de dromadaire dans le désert… le rêve !!
Ensuite on les a laissé rentrer sur Delhi (Denis et Marie devaient reprendre l’avion pour Paris) et Ricardo et moi avons décidé de prendre quelques jours à Udaipur, une ville agréable, entourée de lacs, et dont le célèbre palace, datant de l’époque du Raj, la fait ressembler de près à une citée sortie tout droit des contes des mille et une nuits.
Mes rencontres
Il ne manquait plus qu’elle pour que la bande soit au complet : la petite Marie, tout droit arrivée de Paris, pour 2 semaines de folie !!!
J’ai vraiment apprécié de me retrouver entre potes pour fêter la fin de l’année...
Même si au cours de mon voyage, j’ai rencontré beaucoup de gens dont une bonne partie sont devenus des amis, rien de vaut le plaisir de retrouver des vieux potes pour démarrer la nouvelles année du bon pied !!
Mes coups durs
Je parle là de la fin de l’année mais en réalité nos dates n’ont pas vraiment coïncidées avec celles des fêtes de fin d’année… Pas de chance (mais ça reste un tout petit coup dur !), j’ai passé noël dans le train et le nouvel an dans le bus !!
Après le Rajasthan, retour à Delhi pour mon chéri et moi.
C’est d’ailleurs là qu’à vraiment commencé l’attente, en ce qui concernait ses papiers.
Les jours filaient, notre temps ensemble s’amenuisait, et toujours rien : pas de nouvelles de l’ambassade, impossible de bouger.. Bref, pas terrible !
On a quand même fini par tout régler, 5 jours avant le départ de Ricardo, et on a filé au nord, à Shimla, petite ville de montagne et ancienne station climatique sous l’empire britannique ; puis à Chandigarh, la fameuse ville entièrement dessinée par le Corbusier (et dont j’ai trouvé l’architecture pratique, mais vraiment dénuée de charme).
Ensuite Ricardo a repris l’avion… Pas facile de se séparer de nouveau, surtout que je commençais à m’habituer à avoir un homme à mes côtés, ce qui lorsque l’on voyage en Inde du nord, change beaucoup de choses, en particulier en matière de respect.
Quant à moi, j’ai repris le fil de ma mission, et en quelques sortes mon quotidien :
j’ai recommencé à couchsurfer et à tourner.
Delhi, ma vision de la ville s’embellit ...
Pendant cette dernière semaine passée à Delhi, j’ai découvert (et ce, en grande partie grâce à mes hôtes CS) un nouvel aspect de la capitale indienne :
Un rythme de vie plus décontracté, des gens cultivés et ouverts d’esprit, des endroits sympathiques où sortir le soir (et pas forcement hors de prix), des coins calmes, en dehors du vacarme incessant du centre, bref… presque une autre ville !!
Mes rencontres
Navneet et Priya m’on accueillit dans leur appartement du sud de la ville (réputé pour être moins conservateur que le nord) pendant 7 jours.
En couple depuis longtemps, ils se sont mariés voilà environ un an et vivent séparés de leurs parents (fait suffisamment rare dans la société indienne pour être souligné).
Alors que Navneet est programmateur informatique, Priya est l’assistante d’un célèbre documentariste indien (ce qui nous faisait dès le départ, je l’admets, un point commun).
J’ai découvert en eux, ce que je n’avais jamais rencontré jusque là en Inde : des jeunes totalement ouverts sur monde extérieur, et avec qui je pouvais avoir le même genre de conversation qu’avec mes potes.
J’ai rencontré leurs familles et leurs amis, et je dois dire que nous avons vraiment passé de bons moments ensemble, sans oublier que c’est entièrement grâce à eux que j’ai pu tourner mon portrait de femme à Delhi, puisque Reshu, la jeune fille que j’ai interviewé, se trouvait être la fiancé de Vikram, un ami de Navneet.
Shinvani, 22 ans, est la petite sœur de Vikram. Elle a tenu à me filer un coup de main dans mes recherches pour mon tournage et m’a accompagné dans les bidons-villes pour me faciliter les choses. J’ai aussi passé quelques soirées avec elle à descendre des bouteilles de whisky et tout en chantant du Khaled : « didi, eh didi, eh didi, etc… », on s’est payé de bonnes crises de rire et encore une fois, j’ai été surprise de découvrir le dessous des cartes… La jeunesse indienne contemporaine est bien loin d’être ce que l’on croit (lorsque l’on croit ce qu’en disent ses parents !!)
Mes coups durs
Rien à signaler…
Vous l’aurez compris, mon second séjour à Delhi n’a rien eu à voir avec le premier…
Je reste persuadée que le Couchsurfing y est pour beaucoup, et une fois de plus, je recommande !!
Mon film
Après 2 mois de vacances (si on peut vraiment appeler ça des vacances), j’ai finit par reprendre la caméra pour faire le portrait de Reshu.
Agée de 26 ans, Reshu est l’ainée de 3 enfants. Avec ses 2 jeunes frères et ses parents, elle vit dans la maison de sa grand-mère paternelle à Kohat Enclave, dans le nord de Delhi. Elle travaille comme secrétaire tout en préparant un MBA en RH.
Elle est hindoue, d’une famille originaire du Pendjab et appartient à la classe moyenne. En aout 2008, elle rencontre Vikram, qui travaille dans la même société. Il lui propose le mariage, au bout de 3 mois elle accepte et ils décident de convaincre leurs parents respectifs d’arranger leur mariage. En février 2009, ils se marient en grandes pompes.
La dot est payée, l’image des familles est sauvée par ce « love-cum-arranged marriage », la dernière mode en matière de mariage en Inde, qui signifie que les partenaires sont amoureux l’un de l’autre mais que les parents vont tout de même arranger leur mariage.
Mon sentiment : Reshu sera une épouse et une belle fille respectable, au sein de sa nouvelle famille. Elle se considère comme une femme moderne et libre. Pourtant, sa conception du mariage et de la femme restent tellement conservatrices…
Au terme de ces deux mois en Inde du nord, je dois dire que j’étais plutôt contente de descendre vers le sud, que par expérience, je sais beaucoup plus relax…
Une fois terminé mon portrait de Reshu, j’ai donc récupéré ma sœur Alice (dont le séjour en Inde était prévu depuis déjà plusieurs mois) à l’aéroport, avant de prendre un avion avec elle pour Cochin, dans le Kerala.
Inde du sud : et je me souviens pourquoi ce pays me plait tant…
Au programme de mon dernier mois en Inde : deux semaines de vacances (mais cette fois des vrais vacances !) avec ma sœur, une nouvelle visite de Romain et deux portraits de femmes dans l’Andra Pradesh, à Hyderabad, la plus grande ville musulmane du sous-continent. Comme d’habitude, des hauts et des bas, mais au final beaucoup de bons moments !!
Le Kerala, petit paradis terrestre
Je suis arrivée avec Alice à Cochin, le 9 Février 2009. Pour son premier séjour en Inde, j’avais décidé de lui épargner les grandes villes et planifié un petit tour dans l’une des régions les plus agréables du pays.
Nous avons donc passé 3 jours à Fort Cochin, ancienne enclave portugaise et dernier bastion des juifs de l’Inde ; avant de descendre sur Allepey, une petite ville bordée de canaux que l’on appelle ici des backwaters et située non loin de magnifiques plages de sables blancs. Bref : le pied !!
Romain nous y a rejoints et nous sommes remontés un peu au Nord, vers Munnar, célèbre pour ses collines recouvertes de plantations de thé. On y a loué des motos et on s’est promené le long de routes incroyables de verdure, jusqu’à une cascade où on a pris un bain, comme à la maison !!
Un climat tropical, des gens souriants, une ambiance détendue, des massages ayurvédiques…Une chose est sure, dans le Kerala la vie est douce.
Mes rencontres
Ma petite sœur chérie, bien évidemment, à qui j’étais ravie de faire découvrir un petit bout d’Inde (surtout que c’était le meilleur !!).
La bande de la Gowri guest house, à Allepey, que j’avais rencontré lors de mon dernier passage en Inde en 2006, et en particulier Afsal, un musulman pas vraiment pratiquant de 32 ans, très sympa et toujours prêt à filer un coup de main pour quoi que ce soit.
Romain : encore lui !!!
Apres le départ d’Alice, on a reloué une moto (une mythique Royal Enfield bien sure !!) et on est retourné à Allepey profiter de la plage une toute dernière fois…
Mes coups durs
Rien, à part les mateurs sur la plage qui sont vraiment fatigants… Cela dit je comprends que dans ce pays où les femmes, hindoues ou musulmanes, sont couvertes des pieds à la tête, les pauvres types sont souvent frustrés (ce qui, pour autant, n’excuse pas leur comportement immature et débile).
Hyderabad : cité (pré)historique
Lorsque je suis arrivée à Hyderabad, j’avais pour intention de tourner un portrait de femme relatif à la question du divorce chez les musulmans. Car il faut savoir que l’Inde à ceci de particulier qu’administrativement, toutes les religions sont reconnues et mises sur un pied d’égalité. Ce qui signifie que certaines lois (dont celles qui régissent le mariage) différent en fonction de la religion des individus.
Ainsi, en ce qui concerne les musulmans, (près de la moitié de la population à Hyderabad et plus de 70% des habitants de la vieille ville) c’est la « All India Muslim Personal Law Board » qui détermine les droits et devoirs des époux.
En matière de divorce, cette loi (incroyable mais vrai !) n’autorise les couples à se séparer qu’à la demande du mari, à qui il suffit de prononcer trois fois le mot « talaq » pour se trouver divorcer de sa femme. L’épouse quant à elle, ne peut entamer de procédure de divorce que dans des cas extrêmes, et la plupart du temps, si elle va à l’encontre de la volonté de son mari, elle se voit débouter de sa demande (autant par les chefs religieux que par les tribunaux légaux).
Face à cette situation, j’ai décidé de tourner deux portraits de femme, l’une étant victime d’un divorce non désiré qui l’a conduite à se retrouver mise à la porte de chez elle sans un sous en poche ; l’autre, se voyant refuser le divorce depuis plus de 10 ans alors que son mari lui a sauvagement coupé (et pas juste égratigné puisqu’il le lui a carrément amputé) le nez dans un violent accès de colère.
Mon film
A 20 ans, Nasreen vit aujourd’hui dans une pièce de 9 mètres carré avec son père et sa mère, sa grand-mère et sa sœur, âgée de 21, divorcée, mère d’un bébé de 1 ans et d’une petite fille de 3 ans. 4 mois après son mariage, Nasreen a été renvoyée chez ses parents par son mari parce que son père n’est pas en mesure de payer les 10 000 roupies de dot promise avant le mariage.
Apres avoir tout tenté, allant même jusqu’à la menacer de mort pour récupérer cet argent, il a finit par lui annoncer le triple talaq au téléphone et ainsi prononcer le divorce.
Sans aucun recours contre ce divorce, Nasreen, avec l’aide d’une association, a porté plainte pour exigence de dot et espère ainsi récupérer les 50 000 roupies dépensées par son père pour le mariage. Le jugement n’a pas encore été prononcé mais moins de deux semaines après avoir été arrêté, son ex-mari a payé sa caution pour sortir de prison et s’est remarié. Nasreen quant à elle risque d’être à nouveau mariée d’ici peu de temps ; elle n’en a pas envie mais son père, n’ayant pas les moyens de nourrir toute la famille, lui a déjà trouvé un prétendant…
Sultana a 29 ans et un fils de 12 ans.
Elle a été mariée de force à 17 ans, à un homme de 28 ans.
Il n’a aucune éducation, tandis qu’elle est intelligente et débrouillarde. Elle réussit tout ce qu’elle entreprend ; il est jaloux et la trouve prétentieuse.
Onze mois après leur mariage et alors qu’elle est enceinte de 8 mois, son mari l’assomme et lui ampute le nez avec une tenaille. Il se rend ensuite au poste de police avec le nez pour proclamer son fait. Sultana passe plusieurs mois à l’hôpital. Lorsqu’elle en sort, elle s’installe chez son frère. Son marie purge une peine de 3 ans puis sort de prison. Elle ne peut imaginer retourner vivre avec lui mais il refuse de lui accorder le divorce.
Un an plus tard, Sultana décide de se prendre en charge et de vivre seule. Seule sa belle sœur la soutient financièrement tout en lui conseillant de laisser tomber la plainte qu’elle a déposée en 2002 pour réclamer le paiement des frais d’éducation de leur fils.
Aujourd’hui Sultana s’assume seule, elle travaille comme travailleuse sociale au sein d’une association qui aide les femmes musulmanes de Hyderabad à défendre leurs droits.
La semaine que j’ai passé à Hyderabad n’a pas été facile. Apres les semaines de rêve que je venais de passer dans le Kerala, me retrouver à partager le quotidien de femmes dont les moindres droits sont bafoués au quotidien et qui en plus, vivent dans une pauvreté extrême, à été pour moi moralement très difficile. Heureusement j’ai tout même eu quelques bons moments, comme par exemple le 8 mars, où je suis intervenue dans une conférence sur le thème des droits de la femme, organisée par l’association Shaheen (pour laquelle travaille Sultana) dans le cadre de la journée internationale de la femme.
Me retrouver face à ces femmes en niqab et burqa, ahuries d’entendre qu’elles avaient des droits fondamentaux à faire respecter par leurs maris, leurs pères et leurs frères, et pourtant pleine de bonne volonté m’a fait du bien. Pourtant je doute que pour elles les choses changent vraiment dans les années à venir. J’étais déjà passé à Hyderabad en 2003, et dans mon souvenir, la plupart des femmes portaient le hijab (simple voile couvrant les cheveux) voir le chador ; visiblement depuis, la situation s’est radicalisée…