Coup d'oeil sur l'Asie

jeudi 19 juin 2008

Sweet Lao

Lao d’en haut

Après avoir passé la frontière entre le Vietnam et le Laos à Nam Can et au sortir d’un trajet en bus d’une 20aine d’heures, je suis arrivée à Vientiane, la capitale Lao en croyant (comme les autres passagers occidentaux du bus d’ailleurs…) que je m’étais fait arnaquée et larguée au milieu de nulle part… En fait non, j’étais bien à Vientiane, seulement cette ville de 200 000 habitants ressemble tellement plus à une petite ville de province qu’à la capitale d’un pays d’Asie du Sud-est qu’en y débarquant avec seulement quelques heures de sommeil dans les pattes, j’ai cru devoir reprendre un bus pour arriver à destination !

Finalement, j’ai embarqué dans un tuk-tuk direction le centre ville, à moins d’une dizaine de kilomètres de là.

Je suis arrivée chez mon « couch owner », un prof. de français béninois du nom de Sorif, installé sur le campus de l’Université d’ingénierie de Sokpaluang.


Vientiane


Dès cette première journée, j’ai pu apprécier le calme et la tranquillité de cette ville tellement différente de toutes les autres capitales de la région.
Ici, pas d’embouteillages, pas de bruits de klaxon… Les rues sont larges, propres et bordées de trottoirs en parfait état. La nuit, un peu partout, on entend les insectes et les grenouilles s’égosiller dans un concert des plus surprenants.

Vientiane borde le Mékong, ce grand fleuve rouge qui délimite la frontière d’avec la Thaïlande. Sur ses berges des petites échoppes vendent de la bière et des shakes aux fruits pour presque rien. On y mange des brochettes de viande et de poisson accompagné de « sticky rice », préparé selon la tradition Lao.



La ville regorge de temples bouddhistes, les « vats » où des moines en tenue orange passent leurs journées à dormir à l’ombre d’arbres imposants dont on comprend, à la taille de leur tronc et l’épaisseur de leur feuillage, qu’ils ont déjà traversé plusieurs siècles.



Au total, j’ai passé à Vientiane un peu plus de 2 semaines, le temps de m’imprégner de son ambiance nonchalante et de profiter des innombrables sourires qu’adressent les Lao de tous âges aux étrangers, généralement accompagné d’un joyeux « sabai dee », qui signifie tout simplement bonjour en langue lao.
J’ai été surprise de découvrir le mode vie des jeunes de la classe moyenne, assez nombreuse à Vientiane. Ceux-là même qui paradent sur des scooteurs flambants neufs et se déchainent dans les boites de nuit au son des rythmes d’un Eminem ou d’une Britney Spears ; les filles fringuées en mini et les garçons arborant des coiffures hyper élaborées (et hyper, hyper gominées !).
J’ai eu du mal en croire mes yeux quand j’ai vu la facilité avec laquelle les « falangs », autrement dit les étrangers, attiraient les jeunes filles lao dans leur lit : un coup d’œil, un échange de numéro de téléphone, et le lendemain l’affaire est réglée… Cela malgré le fait qu’au Laos, les relations sexuelles hors mariage entre lao et étrangers sont complètement interdites et répréhensibles d’une très grosse amende (environ 2000 dollars) et d’une expulsion du pays pour l’étranger. Et je ne parle pas là de prostitution !!!
Cela dit, les relations amoureuses et sexuelles hors mariage, même entre jeunes lao, semblent beaucoup moins taboues que dans les autres pays d’Asie que j’ai pu visiter jusque là. D’ailleurs, autre surprise et non la moindre, ici, les travestis sont choses courantes… On les appelle « catoys » ou lady-boys, et ils sont complètement intégrés à la société Lao. Ils se promènent maquillés et vêtus en femmes, au point qu’il est parfois difficile de faire la différence. Il semblerait que la culture lao, au moins dans certaines ethnies, favorise l’homosexualité et le changement (au moins en apparence..) de genre. D’après ce que j’ai pu récolter comme infos, ce sont souvent les familles qui choisissent d’élever l’un de leur fils comme une fille, et ce dès sa naissance.
Il faut dire qu’au Laos, les femmes sont vraiment les piliers de la société et de la famille : ce sont généralement les filles ainées qui travaillent pour nourrir leurs familles et en cas de mariage, le nouvel époux emménage dans la maison de sa femme, contrairement aux traditions en vigueur dans les pays frontaliers du Vietnam et de la Chine.


Mes rencontres

Comme d’habitude, d’abord mes hôtes de couchsurfing…
Au Laos malheureusement, l’offre en canapés à surfer est assez pauvre… Lors de mes recherches, je n’ai pu trouver que 3 personnes prêtes à héberger des bagpackers. J’en ai choisit une chez qui je suis restée plus d’une semaine !!!
Il s’agit d’un béninois d’une trentaine d’année, Sorif, dont j’ai déjà fait mention plus haut.

Installé au Laos depuis seulement 3 semaines avant mon arrivée, il fait partie d’un programme de l’agence pour la francophonie, qui consiste à placer pour des contrats d’un an, une 20aine de professionnels francophones, dans des institutions et entreprises pour favoriser l’apprentissage de la langue à l’étranger.
Très accueillant, Sorif n’a pas hésité une seconde à me prêter sa chambre d’amis et à me présenter ses relations à Vientiane.
Grace à lui, j’ai découvert la cuisine des meilleures échoppes de rue.


Sur le campus de Sokpaluang, j’ai aussi fait la connaissance « des français » : un groupe de 3 étudiants en école d’ingénieurs à Paris en stage pour 3 mois au Laos, et d’une fille du nord de la France, elle aussi prof de français à l’université.
Alexandre, Julien, Stéphane et Laurie-Anne ont été pour moi des guides précieux…
Grace à eux j’ai découvert la vie nocturne de Vientiane, et surtout j’ai rencontré Noy, dont j’ai tiré le portrait pour mon film.


Aachal, je l’ai trouvée sur couchsurfing. Originaire des iles Fidji, elle vit à Vientiane depuis près d’un an et travaille pour le programme alimentaire mondial des Nations Unies. On s’est donné rendez-vous pour un déjeuner et on a tout de suite sympathisé.
Elle m’a invité à son anniversaire, quelques jours plus tard, et là j’ai pu me faire une idée de la présence humanitaire au Laos… Au moins une 50aine d’expat. étaient présents, tous employés d’ONG !!! J’ai tenté de faire mon marché pour repérer ceux qui pourraient m’orienter dans mes recherches et j’ai finalement rencontré Vong, un jeune Lao francophone qui m’a mit en contact avec la personne idéale, directeur d’une association chargée de réinsérer les femmes victimes de trafic.

Enfin, parmi mes rencontres à Vientiane, je dois dire que la plus importante pour moi à été celle dont je rêvais depuis longtemps… Ricardo, mon amoureux, est venu passer 3 semaines avec moi au Laos. Tout s’est décidé à la dernière minute et on a pu fêter ses 30 ans ensemble dans un restaurant gastro de la capitale. On s’est baladé du nord au sud et en vrai gentleman, il porté mon sac pendant tout son séjour !!!

Ces petites vacances m’ont fait beaucoup de bien et m’ont permis de recharger mes batteries pour la suite. Prochain rendez-vous : l’Inde en décembre… Aïe aïe aïe, je compte déjà les jours !!!

Mes coups durs


Au Laos la vie est facile… la criminalité, en particulier envers les étrangers, est pratiquement nulle, et je n’ai rencontré aucun soucis particulier.
La plupart des gens sont aimables, accueillants et parlent un peu anglais (en particulier ceux qui sont en contact régulier avec les touristes) ou même français…
Vientiane est une petite ville et il est très facile de s’y orienter. Les transports publics sont peu onéreux et plutôt bien organisés, bref, c’est un peu le paradis de l’Asie du sud-est…


Mon film


Là par contre, les choses ont été moins faciles que partout ailleurs… Rien que dans mes recherches, j’ai rencontré beaucoup de difficultés à obtenir des informations.
N’ayant pas les autorisations officielles nécessaires pour tourner au Laos (autorisations quasi impossibles à obtenir, surtout compte-tenu de la teneur et des conditions de réalisation de mon projet), j’ai du faire face à beaucoup de mauvaise volonté de la part de mes interlocuteurs.
La seule organisation nationale Lao en charge des femmes, l’Union des Femmes Lao, à qui j’ai rendu visite sans préciser mes véritables intentions (je leur ai juste demandé s’il était possible de faire du bénévolat et de participer à leurs projets – tout ça, juste pour en connaître la teneur) m’a quasiment mise à la porte de ses locaux (tout à fait poliment cependant…) avant de téléphoner, tout de suite après mon départ, au ministère des affaires étrangères pour les prévenir de mon passage (ce que bien sure je n’ai appris que plus tard).

Les responsables des ONG et les Nations Unies, à qui j’ai cette fois annoncé clairement mon projet, ont tout simplement refusé de me recevoir, même seulement pour me faire un topo sur la situation des femmes dans le pays…

L’association des femmes Lao en France, avec qui j’étais déjà en contact avant de quitter Paris et qui soutient mon projet, m’a mise en relation avec l’une de leur contact à Vientiane, une personne qui n’était autre que la femme du directeur du service de presse du ministère des Affaires Etrangères !!! Je me suis fait grillée…
Cette dame m’à téléphoné un jour en se présentant et en m’annonçant que je devais rencontrer son mari pour faire une demande officielle d’autorisation de tournage. N’ayant d’autre choix (puisqu’ils étaient déjà au courant de ma présence en ville et de mes intentions) que de suivre ses indications, je me suis présentée (soutenue par Ricardo !!) au bureau du service de presse pour faire ma demande. Là, le chef du service m’a remonté les bretelles pour avoir tenté de prendre contact avec l’Union des Femmes sans aucune autorisation (c’est la que j’ai su pour le coup de téléphone…) et m’a demandé un descriptif complet de mon plan de tournage avec les noms des personnes que je souhaitais interviewer, la liste des questions que je leur poserais, le détails des images que je comptais tourner, etc… Vive la République DEMOCRATIQUE du Laos !!!

J’ai donc fait une demande de mise en contact avec l’Union tout en sachant qu’elle n’abouterait pas, tout ça pour ne pas éveiller les soupçons et pouvoir continuer mes recherches ailleurs…

C’est d’ailleurs ce que j’ai fait… après avoir rencontré officieusement le responsable d’une ONG en charge de femmes victimes de trafic (sexuel et autres…) vers les pays frontaliers, j’ai pu obtenir (en échange de la promesse de ne pas faire apparaître les liens entre cette association et moi dans le film et de garder secrète l’identité de la jeune fille) qu’il me présente à des personnes de son équipe (toujours officieusement et en dehors de leurs bureaux), qui m’ont finalement amené à rencontrer une jeune prostituée de nom de Tiam.


Tiam
A 18 ans, Tiam a déjà un passif plutôt consternant… Issue d’une famille pauvre des campagnes lao, elle est confiée à 13 ans à une proche de la famille installée en Thaïlande. Forcée à travailler sans rémunération dans une usine, elle rencontre un jeune thaï de 7 ans son ainé et se marie avec lui. Alors qu’elle n’a que 14 ans, son mari est mobilisé dans l’armée et elle se retrouve seule dans sa belle famille, là encore, forcée de travailler sans jamais recevoir une seule pièce de monnaie. Au bout d’un an, elle quitte sa belle mère et revient au Laos, où elle se laisse entrainer par une amie à travailler dans un bar.


Rapidement amenée à se prostituer, elle passe les 5 années suivantes à travailler dans différentes maisons de passe au Laos et en Thaïlande. (Là je fais cours, l’interview a durée près de 3 heures..)
Il y a environ un an, elle atterrit à Vientiane et entend parler de cette organisation qui aide les jeunes filles dans son cas. Elle prend contact avec eux, laisse tomber son job de « danseuse » et entame une formation de coiffeuse. C’est dans le salon où elle travaille que je l’ai rencontré.

Noy
Noy, je l’ai rencontrée par Stéphane, le jeune stagiaire de Sokpaluang. Elle est sa copine depuis quelques semaines, parle anglais et dégage un charme certain.
Intelligente, drôle et ne manquant pas de caractère, Noy Vit à Vientiane depuis 5 ans avec l’un de ses frères. Ils viennent de la province de Savannakhet, dans le sud du pays.
Noy a 22 ans, elle termine des études d’anglais à l’université. Elle aime sortir avec ses amis, faire la fête et voyager (même si pour l’instant ses voyages se sont limités à l’intérieur du Laos). Elle sort avec Stéphane malgré son jeune âge (elle préfère les hommes âgés de 35 à 50 ans !!!) parce qu’il la fait rigoler et que comme la plupart des « falangs » et contrairement aux jeunes lao, il la respecte pour ce qu’elle est. Noy est l’exemple typique de la jeune femme moderne, issue de la première génération de lao qui n’a connu qu’un pays ouvert sur le reste du monde, celle la même que j’appelle la génération MTV.

En dehors de Vientiane, j’ai profité de la présence de Ricardo pour m’autoriser un peu de tourisme. Nous sommes donc partis quelques jours à Luang Prabang, dans le nord du Laos.


Luang Prabang



Bien connue au Laos pour son charme colonial, Luang Prabang est une petite ville aux rues pavées et presque piétonnes, tellement la circulation y est rare.
A Vientiane, tout le monde nous en parlait comme la ville la plus jolie et agréable du Laos ; et effectivement, Luang Prabang vaut vraiment les 10h de bus qui permettent d’y accéder (même si parfois, comme ça a été notre cas, on tombe sur le « King of Bus », qui en réalité doit être le bus le plus pourri de tout le pays… Il est perméable à la pluie et comme on est en pleine saison, on est arrivé à destination trempés et prêts pour un essorage !)

Posée au bord du Mékong, Luang Prabang est entourée de montagnes et de rivières.


Sa principale attraction réside en un marché de nuit, installé tous les soirs jusqu’à 22h00 dans la rue principale. Exclusivement destiné aux touristes, ce marché s’étale sur plusieurs centaines de mètres. On y trouve de l’artisanat local, partout les mêmes articles, et il convient de négocier âprement pour ne pas se faire dépouiller, même si en réalité les objets qu’on y trouve, même non négociés, restent moins chers qu’à Vientiane.




Ainsi, pour exemple, Ricardo a acheté un petit bijou en argent pour sa mère : alors qu’à la capitale on lui en demandait 120 000 kips, l’équivalent de presque 10 euros, à Luang Prabang on le lui à proposé à 60 000 kips ; il l’a négocié et finalement obtenu à 15 000 kips…

Autour de la ville, des grottes et des cascades attirent les touristes (et nous aussi !!!).
On en a donc profité, Ricardo et moi, pour aller se rafraichir dans les basins d’une eau bleu turquoise qui s’enchainent au fil des chutes d’eau.
J’ai adoré… J’aurai pu y passer des semaines !!! Mis comme toutes les bonnes choses ont un fin, on a fini par rentrer à Vientiane où j’avais un tournage de prévu sur quelques jours.


Lao d’en bas



Pakse


Une fois mon boulot terminé, on a pu repartir se balader en amoureux. Cette fois on a choisit de descendre à Pakse, la principale ville du sud Laos.
Encore une nuit passée dans le bus (mais cette fois on a pu éviter le « King of Bus »), et on est arrivé dans une petite ville sans grand intérêt, toujours sur les bords du Mékong (à croire que toutes les villes du pays bordent le fleuve…).


On y a passé une nuit histoire de se reposer un peu et on a filé le lendemain vers Tadlo, un village sensé être à une heure et demi de route. Mais comme on a pris le bus local, on a mis à peu près deux fois plus de temps : entre les arrêts tous les 100 mètres pour faire monter et descendre des passagers, charger d’énormes sacs de jute remplis à craquer et les pannes de moteur, on a largement eu le temps d’apprécier le trajet. J’en ai profité pour prendre quelques photos…










Tadlo





Le bus a fini par nous lâcher sous une pluie torrentielle, au bord d’un chemin de terre. Apres 2 km de marche (merci à mon amoureux, qui portait pratiquement tous les sacs !!!) on est arrivé dans un petit village fait de huttes en bois et feuilles tressées, le tout perché sur pilotis, probablement pour éviter les inondations et l’intrusion des animaux de ferme qui se ballades un peu partout en liberté.

Partout des enfants à moitié nus (voire aussi complètement nus d’ailleurs…), quelques guest houses et bien sure, des chutes d’eau…
C’était notre dernière semaine de vacances, on a choisit de se poser dans ce petit coin de campagne et de ne rien faire, sinon d’aller se promener de village en village et de se baigner dans la rivière (moins belle que celle de Luang Prabang mais déserte, à part les enfants du coin et tout aussi rafraichissante).

Cinq jours plus tard, il a bien fallu rentrer à Pakse, Ricardo devant se rendre à Bangkok pour reprendre l’avion. Triste dernière journée de vacances… il a embarqué dans un bus en milieu d’après-midi, quand à moi j’ai attendu le lendemain pour prendre un mini bus direction Phnom Penh, au Cambodge.



3 commentaires:

Laurie-Anne a dit…

Hello Poulette! Super article à propos de ton séjour au Laos, c'est un plaisir de te lire!
J'ai adoré les moments passés en ta compagnie et celle de Ricardo, j'en garde de très bons souvenirs.
Je me suis permise de te linker sur mon blog, car je veux que le monde entier connaisse ton beau projet ;)
mon blog : http://sabaidilaos.blogspot.com/

Anonyme a dit…

bravo et merci pour les nouvelles, et les belles images. Nous aussi, on a rendez-vous en Inde, et je compte les jours... en attendant je t'embrasse bien fort, et surtout prends bien soin de toi
Mam

Anonyme a dit…

BRAVO EMILIE DE NOUS DONNER TANT DE NOUVELLES DE CE VOYAGE REMPLI DE RICHESSES ET D'EMOTIONS...
BON COURAGE ET J'ESPERE QUE TOUT CONTINUE A BIEN SE PASSER POUR TOI !
BISES
LA TRIPLETTE MARTINIQUAISE
ALEXANDRA